Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XIV.djvu/467

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LE PROGRÈS==


L’Utile fait tenir tour à tour son flambeau
Par son frère le Laid, par son frère le Beau ;
Nul n’est trop bas et nul n’est trop haut pour l’Utile ;
Seul il sait la façon dont chaque être est fertile ;
Dans la foudre qui passe il voit une clarté.
Le Progrès, qui s’appelle aussi nécessité,
Ploie invinciblement à son œuvre les hommes,
Les derniers des hameaux et les premiers des Romes,
Les grands et les petits, et noue au même fil.
Ce qui paraît auguste et ce qui semble vil ;
Il fait jaillir l’éclair de la poudre, étincelle .
Où s’évanouira le passé qui chancelle,
De la profonde nuit d’un cerveau monacal ;
Pour faire une brouette il dépense Pascal ;
A son but, à sa loi, tout concourt, tout se range,
Tout obéit ; l’Utile a cette force étrange
De se faire à la fois servir par l’ignorant
Et par l’altier génie au fond des cieux errant ;
Le moulin d’un côté tire à lui mir la route
L’âne abject qui se traîne à pas lents et qui broute,
Et de l’autre à son aile il mêle l’ouragan.

CXXXIII La cloche suspendue