devaient le pouvoir qu’ils ont tourné contre moi ! Oh ! que le ciel et l’enfer m’entendent, et qu’ils soient tous maudits dans leur existence, et maudits dans leur postérité !
Il se tut un moment ; puis, embrassant sa pauvre fille, épouvantée de ses imprécations :
— Mais, mon Éthel, toi qui es ma seule gloire et mon seul bien, dis-moi, comment ton instinct a-t-il été plus habile que le mien ? Comment as-tu découvert que ce traître portait l’un des noms abhorrés qui sont écrits au fond de mon cœur avec du fiel ? Comment as-tu pénétré ce secret ?
Elle rassemblait toutes ses forces pour répondre, quand la porte s’ouvrit.
Un homme vêtu de noir, portant à sa main une verge d’ébène et à son cou une chaîne d’acier bruni, parut sur le seuil, environné de hallebardiers également vêtus de noir.
— Que me veux-tu ? demanda le captif avec aigreur et étonnement.
L’homme, sans lui répondre et sans le regarder, déroula un long parchemin, auquel pendait, à des fils de soie, un sceau de cire verte, et lut à haute voix :
— Au nom de sa majesté notre miséricordieux souverain et seigneur, Christiern, roi,
Il est enjoint à Schumacker, prisonnier d’état dans la forteresse royale de Munckholm, et à sa fille, de suivre le porteur dudit ordre. —
Schumacker répéta sa question :
— Que me veux-tu ?
L’homme noir, toujours impassible, se mit en devoir de recommencer sa lecture.
— Il suffit, dit le vieillard.
Alors, se levant, il fit signe à Éthel, surprise et épouvantée, de suivre avec lui cette lugubre escorte.