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PRÉFACE PHILOSOPHIQUE.

Pour des détails techniques, comme celui des deux glaciers qui font basculer le globe « tous les quinze mille ans, selon les uns, tous les deux cent mille ans, selon les autres », Victor Hugo met le mot : Vérifier.

Parfois, lors d’une première révision, il s’aperçoit que ses descriptions sont trop écourtées, et dans le double feuillet L il intercale quatre feuillets doubles, a b c d, sur le monde ténébreux.

Au feuillet O, nous trouvons l’extrait inséré dans Post-Scriptum de ma vie sous le titre : Choses de l’infini. On remarquera une différence entre les textes. Ce sont de simples interversions nécessitées par la coupure du fragment.

Le manuscrit porte :

Et maintenant, que voulez-vous que je fasse ? Cette énormit" est là. Ce précipice des merveilles est là. Et ignorant, j’y tombe, et savant, je m’y écroule.

Oui, savant, j’entrevois l’incompréhensible ; ignorant, je le sens, ce qui est plus formidable encore.

Voici le texte de Post-Scriptum de ma vie :

Oui, savant, j’entrevois l’incompréhensible, ignorant, je le sens. Devant cette énormité, devant ce précipice de merveilles, que voulez-vous que je fasse ? Ignorant, j’y tombe. Savant, je m’y écroule. (Division xii.)

Victor Hugo ayant examiné longuement le fonds commun de la croyance humaine et des religions dans leur côté métaphysique, l’analyse dans leur côté plastique en montrant l’identité des légendes. C’est ainsi qu’il est conduit à parler de saint Colomban et de sa vie, des oiseaux qui venaient se cacher dans les plis de sa robe, et il cite le passage de Jonas, l’historien de saint Colomban : Conspicit duodecim lupos advenire… intactum relinquunt.

Victor Hugo traduit ainsi cette phrase : « Un jour, douze loups surviennent… et passent. » Mot à mot : « le laissent sans le toucher ».

En marge, Victor Hugo donne cette note en face du mot intactum[1] :

Or il avait bien écrit d’abord : interritum, et il a surchargé le mot en mettant : intactum. Le texte porte cependant interritum. Mais Victor Hugo a fait une confusion de termes, il a cru qu’interritum signifiait mort et il s’est dit : « Que peut signifier cette légende de douze loups qui passent auprès d’un cadavre ? Evidemment l’historien a voulu dire que ces loups laissaient le saint sans y toucher. » De là le mot intactum qu’il a substitué. Mais Victor Hugo n’a pas pris garde que si interitum signifie bien mort avec un seul r, interritum avec deux r veut dire non effrayé, ce qui s’accorde fort bien avec le passage où il est raconté que saint Colomban renvoyait les ours des cavernes, et ce qui suppose qu’il était bien interritus, c’est-à-dire qu’il n’avait pas peur. La quasi-similitude de mots a amené une erreur de traduction, non une erreur d’interprétation de la légende. Nous devions la signaler pour expliquer le sens des indications mentionnées dans le manuscrit. (Division xvii.)

  1. Il y a dans le texte : interritum ; vérifier le mot.