Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome I.djvu/78

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Et que, loin de Cromwell par sa tante élevée,
Elle porte en son cœur la loyauté gravée.
Qu’elle aime fort le roi.


LORD ORMOND.

Pur conte, Rochester !

Mais où l’avez-vous vue ?


LORD ROCHESTER.

Hier même, à Westminster,

À ce banquet royal que la cité de Londre
Donnait au vieux Cromwell. — Dieu veuille le confondre !
J’étais fort curieux de voir le Protecteur.
Mais quand, de son estrade atteignant la hauteur,
J’eus aperçu Francis, si belle et si modeste,
Immobile et charmé, je n’ai plus vu le reste.
Ivre, en vain en tous sens par la foule poussé.
Mon œil au même objet restait toujours fixé ;
Et je n’aurais pu dire, en sortant de la fête.
Si Cromwell en parlant penche ou lève la tête.
S’il a le front trop bas ou bien le nez trop long.
Ni s’il est triste ou gai, laid ou beau, noir ou blond.
Je n’ai dans tout cela rien vu, rien qu’une femme.
Et depuis cette vue, oui, mylord, sur mon âme.
Je suis fou !


LORD ORMOND.

Je vous crois.


LORD ROCHESTER.

Voici mon madrigal.

C’est dans le goût nouveau…


LORD ORMOND.

Cela m’est fort égal.


LORD ROCHESTER.

Égal ! non pas vraiment. Vous savez bien qu’en somme
Shakspeare est un barbare et Wither un grand homme.
Trouve-t-on dans Macbeth un seul rondeau galant ?
Le goût anglais fait place au français ; le talent…