Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome III.djvu/571

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Leur dire : Vétérans, camarades! — Fort bien ! —
Pas un n'a bougé ! vois. C'est qu'ici tu n'es rien.
C'est mon père qu'on craint, c'est mon père qu'on aime.
Ils sont au comte Job avant d'être à Dieu même !
L'hôte seul est sacré, César, pour le bandit.
Or, tu n'es plus notre hôte, et toi-même l'as dit.
Montrant Job.
Ecoute, ce vieillard que tu vois, c'est mon père.
C'est lui qui t'a flétri du fer triangulaire,
Et l'on te reconnaît aux marques de l'affront
Mieux qu'à l'huile sacrée effacée à ton front !
La haine entre vous deux est comme vous ancienne.
Tu mis à prix sa tête, il mit à prix la tienne;
Il la tient. Te voilà seul et nu parmi nous.
Fritz de Hohenstaufen ! regarde-nous bien tous!
Plutôt que d'être entré, car vraiment tu me touches,
Dans ce cercle muet de chevaliers farouches,
Darius, Cadwalla, Gorlois, Hatto, Magnus,
Chez le grand comte Job, burgrave du Taunus,
Il vaudrait mieux pour toi, — roi de Bourgogne et d'Arles,
Empereur, qui ne sais pas même à qui tu parles,
Que rien qu à sa folie on aurait reconnu, —
Il vaudrait mieux, plutôt que d'être ici venu,
Etre entré, quand la nuit tend ses voiles funèbres,
Dans quelque antre d'Afrique, et parmi les ténèbres,
Voir soudain des lions et des tigres, ô roi.
Sortir de toutes parts de l'ombre autour de toi.
Pendant que Magnus a parlé, le cercle des burgraves s'est resserré lentement autour de l'empereur. Derrière les burgraves est venue se ranger silencieusement une triple ligne de soldats armés jusqu'aux dents, au-dessus desquels s'élève la grande bannière du burg mi-partie rouge et noire, avec une hache d'argent brodée dans le champ de gueules, et cette légende sous la hache : MONTI COMAM, VIRO CAPUT. L'empereur, sans reculer d'un pas, tient cette foule en respect. Tout à coup, quand. Magnus a fini, l'un des burgraves tire son épce.

Cadwalla], tirant son épée.
César ! César ! César ! rends-nous nos citadelles !

Darius, tirant son épée.
Nos burgs, qui ne sont plus que des nids d'hirondelles !

Hatto, tirant son épée.
Rends-nous nos amis morts, qui hantent nos donjons
Quand l'âpre vent des nuits pleure à travers les joncs !

Magnus,