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Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome V.djvu/115

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MANGERONT-ILS ?

LE ROI, après réflexion.

Parce que nous avons le même grand-père. Oui.

MESS TITYRUS.

C’est un droit dont toujours la noblesse a joui.

LE ROI.

Lâcher, reprendre, ouvrir, puis refermer la pince,
C’est ma manière. Ainsi je me sens maître et prince.
Pour jouer de la sorte avec l’espoir, l’effroi,
La mort, la vie, il faut, vois-tu bien, être roi.

AÏROLO, à part.

La mort, la vie, il faut, vois-tu bien, être roi. Il suffit d’être tigre.

Il continue sa marche et disparaît dans les recoins de la masure.
LE ROI, se tournant vers le cloître.

Ah ! je finirai, certe,
Vil cloître, par broyer ton enceinte déserte,
Infâme auberge ouverte au vassal fugitif !

MESS TITYRUS.

Milord, c’est une auberge, avec un correctif.
Si quelque moine apporte aux gens, dans ce refuge,
Un aliment quelconque, on le prend, on le juge ;
Un verre d’eau tendu par-dessus le fossé
Est puni. Cette auberge est un doux in-pace.
Aux arbres pas de fruits ; dans l’enclos pas de sources.

Aïrolo reparaît au fond, épiant.

Wulfe, un de vos aïeux, fut un prince à ressources.
Il avait de l’esprit. Or, cet homme d’état,
À prix d’argent, obtint des abbés qu’on plantât
Partout dans cette enceinte un tas d’herbes sinistres.
Les poisons que le diable inscrit sur ses registres
Sont ici tous, s’offrant à la soif, à la faim.
C’est très ingénieux, c’est élégant, c’est fin.