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ACTE PREMIER, SCÈNE IV. 233

ROUSSELINE.

Eh bien, mademoiselle, nous amusons-nous ? avons-nous les plaisirs de notre âge ? c’est un peu ennuyeux, les grands-papas malades ? Prenons-nous au moins des distractions ? Allons-nous au spectacle, au bal ? Il y a dans ce moment-ci à Feydeau un opéra-comic|ue qui fait fureur, les deux Mousquetaires, Lemonnier et Lafeuillade, deux beaux hommes. Il chante.

Je gèle, je gèle, je gèle.

Je donne au diable la saison.

C’est charmant. Il faut voir cela. Avez-vous vu Potier dans Je fais mes farces ?

CYPRIENNE, levant Içs yeux.

Monsieur. . .

GLAPIEU, observant Rousseline, à part. Quel sourire ! il a des dents d’ogresse. C’est égal, la physionomie est bonasse. Voilà un homme fort. On lui donnerait Dieu, et même le diable, sans confession. C’est le comble de l’art, cette mine-là. Avoir l’air d’un garde national habillé en bourgeois, c’est superbe. Il est gras. Je me suis toujours défié des citoyens potelés. Expliquez-moi ça. ROUSSELINE, examinant le travail de Cyprienne. Des doigts de fée. — Il faut voir Potier, mademoiselle, etTiercelin dans le Kempailleur de chaises. Pourtant je préfère la Somnambule. J’aime les pièces sensibles. On a toujours dans l’âme un coin mélancolique. GLAPIEU, à part.

Je te conseille d’être bleuâtre ! ROUSSELINE.

J’étais né pour les sentiments tendres. GLAPIEU, k part.

Flâneur !

ROUSSELINE.

On a un cœur, mademoiselle, quoiqu’on ait quarantc-ncaf ans.