Page:Hugo - Actes et paroles - volume 2.djvu/227

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
219
M. BAROCHE ET VICTOR HUGO.

M. A. de Kerdrel aîné. — Tous les démocrates ont voté contre vous. (Bruit.)

Un membre. — Qu’en savez-vous ?

M. Brives. — Il y a bien eu des démocrates qui ont voté pour M. Baroche. (Hilarité.)

M. Victor Hugo. — C’est à cause de cette profession de foi que j’ai été nommé représentant.

Cette profession de foi, c’est ma vie entière, c’est tout ce que j’ai dit, écrit et fait depuis vingt-cinq ans.

Je défie qui que ce soit de prouver que j’ai manqué à une seule des promesses de ce programme. Et voulez-vous que je vous dise qui aurait le droit de m’accuser ?… (Interruption à droite.)

Si j’avais accepté l’expédition romaine ;

Si j’avais accepté la loi qui confisque l’enseignement et qui l’a donné aux jésuites ;

Si j’avais accepté la loi de déportation qui rétablit la peine de mort en matière politique ;

Si j’avais accepté la loi contre le suffrage universel, la loi contre la liberté de la presse ;

Savez-vous qui aurait eu le droit de me dire : Vous êtes un apostat ? (Montrant la droite.) Ce n’est pas ce côté-ci (montrant la gauche) ; c’est celui-là. (Sensation). — (Très bien ! très bien !)

J’ai été fidèle à mon mandat. (Interruption.)

À droite. — Monsieur le président, c’est un nouveau discours. Ne laissez pas continuer l’orateur.

M. le président. — Votre explication est complète.

M. Victor Hugo. — Non ! j’ai à répondre aux calomnies de M. Baroche.

Cris déjà droite. — L’ordre du jour ! Assez ! ne le laissez pas achever !

À gauche. — C’est indigne ! Parlez !

M. Victor Hugo. — Quoi ! hier la violence morale, aujourd’hui la violence matérielle ! (Tumulte.)

M. le président. — Je consulte l’assemblée sur l’ordre du jour. (La droite se lève en masse.)

À gauche. — Nous protestons ! c’est un scandale odieux !

L’ordre du jour est adopté.

M. Victor Hugo. — On accuse et on interdit la défense. Je dénonce à l’indignation publique la conduite de la majorité. Il n’y a plus de tribune. Je proteste.

(L’orateur quitte la tribune. — Agitation prolongée. — Protestation à gauche.)