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I


EXPULSION DE JERSEY



Cependant, souterrainement, Louis Bonaparte manœuvrait, ce qui lui avait attiré l’Avertissement qu’on a lu plus haut ; il avait mis en mouvement dans la chambre des communes quelqu’un d’inconnu qui porte un nom connu, sir Robert Peel, lequel avait, dans le patois sérieux qu’admet la politique, particulièrement en Angleterre, dénoncé Victor Hugo, Mazzini et Kossuth, et dit de Victor Hugo ceci : « Cet individu a une sorte de querelle personnelle avec le distingué personnage que le peuple français s’est choisi pour souverain. » Individu est, à ce qu’il paraît, le mot qui convient ; un M. de Ribaucourt l’a employé plus tard, en mai 1871, pour demander l’expulsion belge de Victor Hugo ; et M. Louis Bonaparte l’avait employé pour qualifier les représentants du peuple proscrits par lui en janvier 1852. Ce M. Peel, dans cette séance du 13 décembre 1854, après avoir signalé les actes et les publications de Victor Hugo, avait déclaré qu’il demanderait aux ministres de la reine s’il n’y aurait pas moyen d’y mettre un terme. La persécution du proscrit était en germe dans ces paroles. Victor Hugo, indifférent à ces choses diverses, continua l’œuvre de son devoir, et fit passer par-dessus la tête du gouvernement anglais sa Lettre à Louis Bonaparte, qu’on vient de lire. La colère fut profonde. L’alliance anglo-française éclata ; la police de Paris vint déchirer l’affiche du proscrit sur les murs de Londres. Cependant le gouvernement anglais trouva prudent d’attendre une autre occasion. Elle ne tarda pas à se présenter. Une lettre éloquente, ironique et spirituelle, adressée à la reine et signée Félix Pyat, fut publiée à Londres et reproduite à Jersey par le journal l’Homme (voir le livre les Hommes de l’exil). L’explosion eut lieu là-dessus. Trois