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CE QUE C’EST QUE L’EXIL.

solitude ; il a senti la profonde chaleur du peuple doux et triste, l’ouverture des cœurs s’est faite de son côté, il remercie l’immense âme humaine. Il a été aimé de loin et de près. Il a eu autour de lui d’intrépides compagnons d’épreuve, obstinés au devoir, opiniâtres au juste et au vrai, combattants indignés et souriants ; cet illustre Vacquerie, cet admirable Paul Meurice, ce stoïque Schœlcher, et Ribeyrolles, et Dulac, et Kesler, ces vaillants hommes, et toi, mon Charles, et toi, mon Victor… – Je m’arrête. Laissez-moi me souvenir.


XV


Il ne finira pas ces pages, pourtant, sans dire que, durant cette longue nuit faite par l’exil, il n’a pas perdu de vue Paris un seul instant.

Il le constate, et, lui qui a été si longtemps l’habitant de l’obscurité, il a le droit de le constater, même dans l’assombrissement de l’Europe, même dans l’occultation de la France, Paris ne s’éclipse pas. Cela tient à ce que Paris est la frontière de l’avenir.

Frontière visible de l’inconnu. Toute la quantité de Demain qui peut être entrevue dans Aujourd’hui. C’est là Paris.

Qui cherche des yeux le Progrès, aperçoit Paris.

Il y a des villes noires ; Paris est la ville de lumière.

Le philosophe la distingue au fond de ses songes.