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Page:Hugo - Actes et paroles - volume 4.djvu/186

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PENDANT L’EXIL. — 1869.

Je vous remercie de me fournir le moyen de faire cesser une équivoque.

Premièrement, je suis un simple lecteur du Rappel. Je croyais l’avoir assez nettement dit pour n’être pas contraint de le redire.

Deuxièmement, je n’ai conseillé et je ne conseille aucune manifestation populaire le 26 octobre.

J’ai pleinement approuvé le Rappel demandant aux représentants de la gauche un acte, auquel Paris eût pu s’associer. Une démonstration expressément pacifique et sans armes, comme les démonstrations du peuple de Londres en pareil cas, comme la démonstration des cent vingt mille fenians à Dublin il y a trois jours, c’est là ce que demandait le Rappel.

Mais, la gauche s’abstenant, le peuple doit s’abstenir.

Le point d’appui manque au peuple.

Donc pas de manifestation.

Le droit est du côté du peuple, la violence est du côté du pouvoir. Ne donnons au pouvoir aucun prétexte d’employer la violence contre le droit.

Personne, le 26 octobre, ne doit descendre dans la rue.

Ce qui sort virtuellement de la situation, c’est l’abolition du serment.

Une déclaration solennelle des représentants de la gauche se déliant du serment en face de la nation, voilà la vraie issue de la crise. Issue morale et révolutionnaire. J’associe à dessein ces deux mots.

Que le peuple s’abstienne, et le chassepot est paralysé ; que les représentants parlent, et le serment est aboli.

Tels sont mes deux conseils, et, puisque vous voulez bien me demander ma pensée, la voilà tout entière.

Un dernier mot. Le jour où je conseillerai une insurrection, j’y serai.

Mais cette fois, je ne la conseille pas.

Je vous remercie de votre éloquent appel. J’y réponds en hâte, et je vous serre la main.

Victor Hugo