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CONGRÈS LITTÉRAIRE INTERNATIONAL.
séance du 25 juin
Présidence de Victor Hugo.

Messieurs, permettez-moi d’entrer en toute liberté dans la discussion. Je ne comprends rien à la déclaration de guerre qu’on fait au domaine public.

Comment ! on ne publie donc pas les œuvres de Corneille, de La Fontaine, de Racine, de Molière ? Le domaine public n’existe donc pas ? Où sont, dans le présent, ces inconvénients, ces dangers, tout ce dont le Cercle de la librairie nous menace pour l’avenir ?

Toutes, ces objections, on peut les faire au domaine public tel qu’il existe aujourd’hui.

Le domaine public est détestable, dit-on, à la mort de l’auteur, mais il est excellent aussitôt qu’arrivé l’expiration… de quoi ? De la plus étrange rêverie que jamais des législateurs aient appliquée à un mode de propriété, du délai fixé pour l’expropriation d’un livre.

Vous entrez là dans la fantaisie irréfléchie de gens qui ne s’y connaissent pas. Je parle des législateurs, et j’ai le droit d’en parler avec quelque liberté. Les hommes qui font des lois quelquefois s’y connaissent ; ils ne s’y connaissent pas en matière littéraire. (Rires approbatifs.)

Sont-ils d’accord au moins entre eux ? Non. Le délai de protection qu’ils accordent est ici de dix ans, là de vingt ans, plus loin de cinquante ans ; ils vont même jusqu’à quatrevingts ans. Pourquoi ? Ils n’en savent rien. Je les défie de donner une raison.