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LE BANQUET DE MARSEILLE.

liberté de conscience ; liberté dans la vie, délivrance dans la mort ; l’homme libre, l’âme libre.

Célébrons donc ce rassurant anniversaire, le 22 septembre 1792. Il y a une aurore dans l’humanité, comme il y en a une dans le ciel ; ce jour-là le ciel et l’homme ont été d’accord, les deux aurores ont fait leur jonction. Lux populi, lux Dei.

La généreuse ville de Marseille a raison de vénérer ce jour suprême ; elle fait bien ; je m’associe à sa patriotique manifestation.

Cet anniversaire vient à propos.

Il y a quatre vingt-quatre ans, à pareil jour, au milieu des plus redoutables complications, en présence de la coalition des rois, l’immense énigme humaine étant posée, une bouche sublime, la bouche de la France, s’est ouverte et a jeté aux peuples ce cri qui est une solution : République ! Il y a dans ce cri une puissance d’écroulement qui ébranle sur leur base les tyrannies, les usurpations et les impostures, et qui fait trembler toutes les tours des ténèbres. L’écroulement du mal, c’est la construction du bien.

Répétons-le, ce cri libérateur République !

Répétons-le d’une voix si ferme et si haute qu’il ait raison de toutes les surdités. Achevons ce que nos aïeux ont commencé. Soyons les fils obéissants de nos glorieux pères. Complétons la révolution française par la fraternité européenne, et l’unité de la France par l’unité du continent. Établissons entre les nations cette solide paix, la fédération, et cette solide justice, l’arbitrage. Soyons des peuples d’esprit au lieu d’être des peuples stupides. Échangeons des idées et non des boulets. Quoi de plus bête qu’un canon ? Que toute l’oscillation du progrès soit contenue entre ces deux termes :

Civilisation, mais révolution.

Révolution, mais civilisation.

Et, convaincus, dévoués, unanimes, glorifions nos dates mémorables. Glorifions le 14 juillet, glorifions le 10 août,