Parce qu’elle sera la même. (Sensation profonde.)
Souvenez-vous des 221. Ce chiffre sonne comme un écho de précipice. C’est là que Charles X est tombé. (Sensation.)
Le gouvernement fait cette imprudence, l’ouverture de l’inconnu.
Messieurs les sénateurs, vous refuserez la dissolution. Et ainsi vous rassurerez la France et vous fonderez le sénat. (Très bien ! à gauche.)
Deux grands résultats obtenus par un seul vote.
Ce vote, la France l’attend de vous.
Messieurs, le péril de la dissolution, ce pourrait être, ou de nous jeter avant l’heure, d’un mouvement éperdu et désordonné, dans le progrès sans transition, et dans ces conditions-là le progrès peut être un précipice ; ou de nous ramener à ce gouffre bien autrement redoutable, le passé. Dans le premier cas, on tombe la tête la première ; dans le second cas, on tombe à reculons. (Applaudissements à gauche, rires à droite.) Ne pas tomber vaut mieux. Vous aurez la sagesse que les ministres n’ont pas. Mais n’est-il pas étrange que le gouvernement en soit là de nous offrir le choix entre deux abîmes ! (Vive émotion.)
Nous ne tomberons ni dans l’un ni dans l’autre. Votre prudence préservera la patrie. On peut dire de la France qu’elle est insubmersible. S’il y avait un déluge, elle serait l’arche. Oui, dans un temps donné, la France triomphera de l’ennemi du dedans comme de l’ennemi du dehors. Ce n’est pas une espérance que j’exprime ici, c’est une certitude. Qu’est-ce qu’une coalition des partis contre la souveraine réalité ? Quand même un de ces partis voudrait mettre le droit divin au-dessus du droit public, et l’autre le sabre au-dessus du vote, et l’autre le dogme au-dessus de la raison, non, une arrestation de civilisation en plein dix-neuvième siècle n’est pas possible ; une constitution n’est pas une gorge de montagnes où peuvent s’embusquer des trabucaires ; on ne dévalise pas la révolution française ; on ne détrousse pas le progrès humain comme on détrousse