Le grand astre caché derrière la montagne,
Oui, la paix renaîtra. Les peuples s’aimeront.
En attendant, il gronde et médite. L’affront
Est une majesté de plus pour ce génie.
Il a des flamboiements de fureur infinie ;
Fauve, il menace. Arrière, union, joie, amour !
On doit la paix au cygne et la guerre au vautour.
Est-ce qu’on ne voit pas qu’il pleure sa patrie ?
Il jette aux vents sa strophe irritée et meurtrie ;
Par moments il regarde au loin, l’œil plein d’ennui ;
On dirait qu’il fait fuir des monstres devant lui
Avec une secousse énorme de crinière ;
Il semble un spectre errant qui n’a plus de tanière ;
Son pied heurte inquiet le sol traître et peu sûr.
Deuil ! la nuit sans étoile et le ciel sans azur ;
L’Europe aux fers ; au lieu de la France, une morte.
La lumière est vaincue et le néant l’emporte ;
L’avenir se dédit, la gloire se dément ;
Plus d’honneur, plus de foi, plus rien ; l’abaissement,
L’oubli, l’opprobre, un flot de lâcheté qui monte.
Il sent l’âpre aiguillon de toute cette honte ;
L’allure du blessé redoutable lui sied.
Ce lion boite ayant cette épine à son pied.
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