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Page:Hugo - L'Année terrible, 1872.djvu/271

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Qui donc dans ce chaos travaillait ? Je ne sais.
Des foudres ont rugi, des aigles ont passé ;
Tout ce que nous voyons s’est fait entre les serres
Des fléaux inconnus, hideux et nécessaires ;
Ils se sont rués comme une troupe d’oiseaux ;
Le sang profond du cœur, la moelle des os,
Tout l’homme a tressailli dans l’homme, à la venue
Du sombre essaim des faits nouveaux fendant la nue ;
Et dans l’inattendu s’abattant sur nos fronts
Nous avons reconnu le mal dont nous souffrons ;
Alors les appétits des foules redoutables
Se sont mis à mugir au fond de leurs étables,
Et nous avons senti que l’appétit enfin
A tort s’il est l’envie et droit s’il est la faim.
La lumière un moment s’est toute évanouie.
Qu’est-ce que c’était donc que cette heure inouïe ?
Là des chocs furieux, là des venins subtils.
Pourquoi ces vents ont-ils soufflé ? d’où viennent-ils ?
Pourquoi ces becs de flamme écrasant ces couvées ?
Pourquoi ces profondeurs brusquement soulevées ?
On a fait des forfaits dont on est innocent.
Les révolutions parfois versent le sang,
Et, quand leur volonté de vaincre se déchaîne,
Leur formidable amour ressemble à de la haine.
Maintenons, maintenons les principes sacrés ;
Mais quand par l’aquilon les cœurs sont égarés,
Quand ils soufflent sur nous comme sur de la cendre,
Au fond du noir problème il faut savoir descendre ;