Page:Hugo - L'Homme qui rit, 1869, tome 2.djvu/248

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— Pourquoi faire ? demanda Gwynplaine.

— Pour vous marier.

— Mais c’est fait, répondit Dea.

Dea ne comprenait point qu’on pût être mari et femme plus qu’ils ne l’étaient.

Au fond, ce contentement chimérique et virginal, ce naïf assouvissement de l’âme par l’âme, ce célibat pris pour mariage, ne déplaisait point à Ursus. Ce qu’il en disait, c’était parce qu’il faut bien parler. Mais le médecin qu’il y avait en lui trouvait Dea, sinon trop jeune, du moins trop délicate et trop frêle pour ce qu’il appelait « l’hyménée en chair et en os ».

Cela viendrait toujours assez tôt.

D’ailleurs, mariés, ne l’étaient-ils point ? Si l’indissoluble existait quelque part, n’était-ce pas dans cette cohésion, Gwynplaine et Dea ! Chose admirable, ils étaient adorablement jetés dans les bras l’un de l’autre par le malheur. Et comme si ce n’était pas assez de ce premier lien, sur le malheur était venu se rattacher, s’enrouler et se serrer l’amour. Quelle force peut jamais rompre la chaîne de fer consolidée par le nœud de fleurs ?