Page:Hugo - L'Homme qui rit, 1869, tome 2.djvu/290

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dont ils sont les propriétaires. Ils sont les légitimes, tu es l’intrus, tu vis en concubinage avec la chance. Que veux-tu de plus que ce que tu as ? Que Schiboleth me soit en aide ! ce polisson est un maroufle. Se multiplier par Dea, c’est pourtant agréable. Une telle félicité ressemble à une escroquerie. Ceux qui ont le bonheur ici-bas par privilège de là-haut n’aiment pas qu’on se permette d’avoir tant de joie au-dessous d’eux. S’ils te demandaient : de quel droit es-tu heureux ? tu ne saurais que répondre. Tu n’as pas de patente, eux ils en ont une. Jupiter, Allah, Vishnou, Sabaoth, n’importe, leur a donné le visa pour être heureux. Crains-les. Ne te mêle pas d’eux afin qu’ils ne se mêlent pas de toi. Sais-tu ce que c’est, misérable, que l’heureux de droit ? C’est un être terrible, c’est le lord. Ah ! le lord, en voilà un qui a dû intriguer dans l’inconnu du diable avant d’être au monde, pour entrer dans la vie par cette porte-là ! Comme il a dû lui être difficile de naître ! Il ne s’est donné que cette peine-là, mais, juste ciel ! c’en est une ! obtenir du destin, ce butor aveugle, qu’il vous fasse d’emblée au berceau maître des hommes ! corrompre ce buraliste pour