Page:Hugo - La Fin de Satan, 1886.djvu/157

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Au fond de l’horizon est le Golgotha fauve ;
Mont sans arbre, sans herbe et sans fleurs ; sommet chauve
Et propre à la croissance horrible des gibets ;
Ceux qui cherchent le sens des anciens alphabets
Et qui font du Talmud leur sévère lecture,
Tremblent devant ce mont, sachant son aventure ;
Le vaste Adam est là, sous la terre dormant ;
Si bien que le Calvaire est le noir renflement
De ce grand corps gisant sous la morne campagne,
Et qu’un air de cadavre en reste à la montagne.

Le toit de Psyphax, bas et marqué d’un poteau,
Fait une ampoule au centre isolé du plateau.
Le peuple craint les toits mystérieux des guèbres.
Ces fous de la lumière ont l’œil plein de ténèbres ;
On les voue aux métiers immondes : ils les font.
Ils mêlent leur chimère au céleste plafond ;
Ils contemplent la nuit, d’astres profonds semée,
Et l’appellent Saba, ce qui veut dire armée ;
Ils adorent un point du ciel nommé Kébla ;
A toute heure de l’ombre et de l’aube, ils sont là
S’offrant, les hommes nus et les femmes sans voiles,
Au dieu soleil époux des déesses étoiles ;
Ils maudissent la fève et l’ail, craignent le sel
Et l’ambre, et font lever le pain avec du miel.