Page:Hugo - La Légende des siècles, 1e série, édition Hetzel, 1859, tome 2.djvu/44

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On blanchit à la chaux en hâte les grands murs ;
On range dans la cour des plateaux de fruits mûrs,
Des grenades venant des vieux monts Alpujarres,
Le vin dans les barils et l’huile dans les jarres ;
L’herbe et la sauge en fleur jonchent tout l’escalier ;
Dans la cuisine un feu rôtit un sanglier ;
On voit fumer les peaux des bêtes qu’on écorche ;
Et tout rit ; et l’on a tendu sous le grand porche
Une tapisserie où Blanche d’Est, jadis,
A brodé trois héros, Macchabée, Amadis,
Achille ; et le fanal de Rhode, et le quadrige
D’Aétius, vainqueur du peuple latobrige ;
Et, dans trois médaillons marqués d’un chiffre en or,
Trois poëtes, Platon, Plaute et Scaeva Memor.
Ce tapis autrefois ornait la grande chambre ;
Au dire des vieillards, l’effrayant roi sicambre,
Witikind, l’avait fait clouer en cet endroit
De peur que dans leur lit ses enfants n’eussent froid.