Page:Hugo - La Légende des siècles, 2e série, édition Hetzel, 1877, tome 2.djvu/143

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L'un étant ma truelle et l'autre étant mon glaive, Je les laisse songer et ce qu'ils font est bien ; Mon souffle monte au ciel plus haut que ne s'élève L'ouragan libyen ;

Dieu même en est parfois remué. Fils d'un crime, J'ai la sagesse énorme et sombre ; et le démon Prendrait, entre le ciel suprême et son abîme, Pour juge Salomon.

C'est moi qui fais trembler et c'est moi qui fais croire ; Conquérant on m'admire, et, pontife, on me suit ; Roi, j'accable ici-bas les hommes par la gloire, Et, prêtre, par la nuit ;

J'ai vu la vision des festins et des coupes Et le doigt écrivant Mané Thécel Pharès, Et la guerre, les chars, les clairons, et les croupes Des chevaux effarés ;

Je suis grand ; je ressemble à l'idole morose ; Je suis mystérieux comme un jardin fermé ; Pourtant, quoique je sois plus puissant que la rose N'est belle au mois de mai,