Page:Hugo - La Légende des siècles, 2e série, édition Hetzel, 1877, tome 2.djvu/211

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Ils ont pour dieux la force et la ruse aux yeux louches ; Ils font chanter des chants aux trompettes farouches Dont nous, esprits, nous frissonnons, Et rouler, balafrant la nature sacrée, Sur les champs, sur les blés, sur les fleurs que Dieu crée La roue horrible des canons.

Les générations meurent pour leur caprice. Ils disent au tombeau : Prends l'homme et qu'il périsse ! Ô nains, pires que les géants ! Ils ouvrent cette nuit que nul rayon ne perce ; Ils y font brusquement tomber à la renverse Les pâles cadavres béants !

Ils rougissent de sang l'onde et les herbes vertes ; Ils dressent au sommet des collines désertes Le noir gibet silencieux Qui reste tout le jour sans changer d'attitude, Mais qui, dès que la nuit brunit la solitude, Élève ses bras vers les cieux.