Page:Hugo - La Légende des siècles, 2e série, édition Hetzel, 1877, tome 2.djvu/57

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Du haut des cieux, venir à lui les vastes rêves ;
Pythagore disait : Dieu ! fais ce que tu dois !
Thur regardait l’abîme et comptait sur ses doigts ;
35Sadoch rêvait l’éden, ayant pour lit des pierres ;
Zès, qui n’ouvrait jamais qu’à demi les paupières,
Contemplait cette chose implacable, la nuit ;
Sadoch guettait l’autre être insondable, le bruit ;
Sostrate étudiait, dans l’eau qu’un souffle mène,
40Dans la fumée et l’air, la destinée humaine ;
Lycurgue, formidable et pâle, méditait ;
Eschyle était semblable au rocher qui se tait,
Et tournait vers l’Etna fumant son grand front chauve ;
Isaïe, habitant d’un sépulcre, esprit fauve,
45Adressait la parole à ceux qui ne sont plus ;
Comme Isaïe, un sage, un fou, Phégorbélus
Parlait dans la nuée aux faces invisibles,
Et disait, feuilletant on ne sait quelles bibles :
— Je parle, et ne sais pas si je suis écouté ;
50Les spectres plus nombreux que les mouches d’été
M’entourent, et sur moi se précipite et tombe
La légion de ceux qui rêvent dans la tombe ;
On me hait dans le monde étrange de la mort ;
Je sens parfois, la nuit, un rêve qui me mord,
55Et les êtres de l’ombre, essaim, foule inconnue,
M’attaquent quand je dors ; pourtant je continue,
Et je cherche à savoir le grand secret caché
Qu’Ève devina presque et qu’entrevit Psyché. —
Orobanchus, gardien de l’autel des Trois Grâces,
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