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LE MAUVAIS PAUVRE.

— Eh bien ? dit la mère.

— Tout va à la papa, répondit Jondrette, mais j’ai un froid de chien aux pieds. Bon, c’est cela, tu t’es habillée. Il faudra que tu puisses inspirer de la confiance.

— Toute prête à sortir.

— Tu n’oublieras rien de ce que je t’ai dit ? tu feras bien tout ?

— Sois tranquille.

— C’est que… dit Jondrette. Et il n’acheva pas sa phrase.

Marius l’entendit poser quelque chose de lourd sur la table, probablement le ciseau qu’il avait acheté.

— Ah çà, reprit Jondrette, a-t-on mangé ici ?

— Oui, dit la mère, j’ai eu trois grosses pommes de terre et du sel. J’ai profité du feu pour les faire cuire.

— Bon, repartit Jondrette. Demain je vous mène dîner avec moi. Il y aura un canard et des accessoires. Vous dînerez comme des Charles-Dix. Tout va bien !

Puis il ajouta en baissant la voix :

— La souricière est ouverte. Les chats sont là.

Il baissa encore la voix et dit :

— Mets ça dans le feu.

Marius entendit un cliquetis de charbon qu’on heurtait avec une pincette ou un outil en fer, et Jondrette continua :

— As-tu suifé les gonds de la porte pour qu’ils ne fassent pas de bruit ?

— Oui, répondit la mère.

— Quelle heure est-il ?

— Six heures bientôt. La demie vient de sonner à Saint-Médard.