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Page:Hugo - Les Misérables Tome V (1890).djvu/396

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LES MISÉRABLES. — JEAN VALJEAN.

jean ; cet imbécile de Basque qui avait un air mystérieux ! Mais vous venez de trop bonne heure. Il n’est encore que midi et demi. Cosette dort.

Ce mot : Père, dit à M. Fauchelevent par Marius, signifiait : Félicité suprême. Il y avait toujours eu, on le sait, escarpement, froideur et contrainte entre eux ; glace à rompre ou à fondre. Marius en était à ce point d’enivrement que l’escarpement s’abaissait, que la glace se dissolvait, et que M. Fauchelevent était pour lui, comme pour Cosette, un père.

Il continua ; les paroles débordaient de lui, ce qui est propre à ces divins paroxysmes de la joie :

— Que je suis content de vous voir ! Si vous saviez comme vous nous avez manqué hier ! Bonjour, père. Comment va votre main ? Mieux, n’est-ce pas ?

Et, satisfait de la bonne réponse qu’il se faisait à lui-même, il poursuivit :

— Nous avons bien parlé de vous tous les deux. Cosette vous aime tant ! Vous n’oublierez pas que vous avez votre chambre ici. Nous ne voulons plus de la rue de l’Homme-Armé. Nous n’en voulons plus du tout. Comment aviez-vous pu aller demeurer dans une rue comme ça, qui est malade, qui est grognon, qui est laide, qui a une barrière à un bout, où l’on a froid, où l’on ne peut pas entrer ? Vous viendrez vous installer ici. Et dès aujourd’hui. Ou vous aurez affaire à Cosette. Elle entend nous mener tous par le bout du nez, je vous en préviens. Vous avez vu votre chambre, elle est tout près de la nôtre ; elle donne sur des jardins ; on a fait arranger ce qu’il y avait à la serrure, le lit est fait, elle est