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Page:Hugo - Les Travailleurs de la mer Tome II (1892).djvu/14

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LES TRAVAILLEURS DE LA MER

plus rudes escarpements. On peut voir, dans l’île de Serk, le parti que tirent d’une corde à nœuds les pêcheurs du havre Gosselin.

Ses filets et ses lignes et tout son attirail de pêche étaient dans sa barque. Il les y avait mis par habitude, et machinalement, car il allait, s’il donnait suite à son entreprise, séjourner quelque temps dans un archipel de brisants, et les engins de pêche n’y ont que faire.

Au moment où Gilliatt accosta l’écueil, la mer baissait, circonstance favorable. Les lames décroissantes laissaient à découvert, au pied de la petite Douvre, quelques assises plates ou peu inclinées, figurant assez bien des corbeaux à porter un plancher. Ces surfaces, tantôt étroites, tantôt larges, échelonnées avec des espacements inégaux le long du monolithe vertical, se prolongeaient en corniche mince jusque sous la Durande, laquelle faisait ventre entre les deux rochers. Elle était serrée là comme dans un étau.

Ces plates-formes étaient commodes pour débarquer et aviser. On pouvait décharger là, provisoirement, l’en-cas apporté dans la panse. Mais il fallait se hâter, elles n’étaient hors de l’eau que pour peu d’heures. À la mer montante, elles rentreraient sous l’écume.

Ce fut devant ces roches, les unes planes, les autres déclives, que Gilliatt poussa et arrêta la panse.

Une épaisseur mouillée et glissante de goëmon les couvrait, l’obliquité augmentait çà et là le glissement.

Gilliatt se déchaussa, sauta pieds nus sur le goëmon, et amarra la panse à une pointe de rocher.

Puis il s’avança le plus loin qu’il put sur l’étroite cor-