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LES TRAVAILLEURS DE LA MER

que mess Lethierry, trop occupé pour venir en personne, désirait que le mariage se fît incontinent. Ce désir, exprimé verbalement, n’est point assez. Je ne saurais, à cause des dispenses à accorder et de l’irrégularité que je prends sur moi, passer outre si vite sans m’informer près de mess Lethierry, à moins qu’on ne me montre sa signature. Quelle que soit ma bonne volonté, je ne puis me contenter d’une parole qu’on vient me redire. Il me faudrait quelque chose d’écrit.

— Qu’à cela ne tienne, dit Gilliatt.

Et il présenta au révérend doyen un papier.

Le doyen se saisit du papier, le parcourut d’un coup d’œil, sembla passer quelques lignes, sans doute inutiles, et lut tout haut :

— « … Va chez le doyen pour avoir les dispenses. Je désire que le mariage se fasse le plus tôt possible. Tout de suite serait le mieux. »

Il posa le papier sur la table, et poursuivit :

— Signé Lethierry. La chose serait plus respectueusement adressée à moi. Mais puisqu’il s’agit d’un collègue, je n’en demande pas davantage.

Ebenezer regarda de nouveau Gilliatt. Il y a des ententes d’âmes. Ebenezer sentait là une fraude ; et il n’eut pas la force, il n’eut peut-être pas même l’idée, de la dénoncer. Soit obéissance à un héroïsme latent qu’il entrevoyait, soit étourdissement de la conscience par le coup de foudre du bonheur, il demeura sans paroles.

Le doyen prit la plume et remplit, aidé du registraire, les blancs de la page écrite sur le registre, puis il se