Aller au contenu

Page:Hugo - Les Travailleurs de la mer Tome II (1892).djvu/41

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
37
L’ÉCUEIL

Être hors d’elle et près d’elle ; tel était le problème.

La difficulté se compliquait.

Où trouver un abri dans de telles conditions ?

Gilliatt songea.

Il ne restait plus que les deux Douvres. Elles semblaient peu logeables.

On distinguait d’en bas sur le plateau supérieur de la grande Douvre une espèce d’excroissance.

Les roches debout à cime plate, comme la grande Douvre et l’Homme, sont des pics décapités. Ils abondent dans les montagnes et dans l’océan. Certains rochers, surtout parmi ceux qu’on rencontre au large, ont des entailles comme des arbres attaqués. Ils ont l’air d’avoir reçu un coup de cognée. Ils ont soumis en effet au vaste va-et-vient de l’ouragan, ce bûcheron de la mer.

Il existe d’autres causes de cataclysme, plus profondes encore. De là sur tous ces vieux granits tant de blessures. Quelques-uns de ces colosses ont la tête coupée.

Quelquefois cette tête, sans qu’on puisse s’expliquer comment, ne tombe pas, et demeure, mutilée, sur le sommet tronqué. Cette singularité n’est point très rare. La Roque-au-Diable, à Guernesey, et la Table, dans la vallée d’Annweiler, offrent, dans les plus surprenantes conditions, cette bizarre énigme géologique.

Il était probablement arrivé à la grande Douvre quelque chose de pareil.

Si le renflement qu’on apercevait sur le plateau n’était pas une gibbosité naturelle de la pierre, c’était nécessairement quelque fragment restant du faîte ruiné.