Page:Hugo - Les Travailleurs de la mer Tome I (1891).djvu/234

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
232
LES TRAVAILLEURS DE LA MER

prismes microscopiques de glace auxquels Mariotte attribue les halos, les parhélies et les parasélènes. Les brouillards orageux sont composites ; des vapeurs diverses, de pesanteur spécifique inégale, s’y combinent avec la vapeur d’eau, et se superposent dans un ordre qui divise la brume en zones et fait du brouillard une véritable formation ; l’iode est en bas, le soufre au-dessus de l’iode, le brome au-dessus du soufre, le phosphore au-dessus du brome. Ceci, dans une certaine mesure, en faisant la part de la tension électrique et magnétique, explique plusieurs phénomènes, le feu Saint-Elme de Colomb et de Magellan, les étoiles volantes mêlées aux navires dont parle Sénèque, les deux flammes Castor et Pollux dont parle Plutarque, la légion romaine dont César crut voir les javelots prendre feu, la pique du château de Duino dans le Frioul que le soldat de garde faisait étinceler en la touchant du fer de sa lance, et peut-être même ces fulgurations d’en bas que les anciens appelaient « les éclairs terrestres de Saturne ». À l’équateur, une immense brume permanente semble nouée autour du globe, c’est le cloud-ring, l’anneau de nuages. Le cloud-ring a pour fonction de refroidir le tropique, de même que le Gulf-Stream a pour fonction de réchauffer le pôle. Sous le cloud-ring, le brouillard est fatal. Ce sont les latitudes des chevaux, horse latitude ; les navigateurs des derniers siècles jetaient là les chevaux à la mer, en temps d’orage pour s’alléger, en temps de calme pour économiser la provision d’eau. Colomb disait : Nube abaxo es muerte. « le nuage bas est la mort. » Les Étrusques, qui sont pour la météorologie ce que les chaldéens sont pour l’astronomie, avaient deux pontificats, le