Page:Hugo Hernani 1889.djvu/196

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
188
NOTES D’HERNANI

Roule, et qui le gênaient, et qu’il ne connaît plus !
Gouverner tout cela ! monter, si l’on vous nomme,
À ce faîte ! y monter, sachant qu’on n’est qu’un homme
Avoir l’abîme là ! — Malheureux ! qu’ai-je en moi ?
Être empereur ? mon Dieu ! j’avais trop d’être roi !
Certe, il n’est qu’un mortel de race peu commune
Dont puisse s’élargir l’âme avec la fortune.
Mais, moi ! qui me fera grand ? qui sera ma loi ?
Qui me conseillera ?

Il tombe à genoux devant le tombeau.
Qui me conseillera ? Charlemagne ! c’est toi !

Ah ! puisque Dieu, pour qui tout obstacle s’efface,
Prend nos deux majestés et les met face à face,
Verse-moi dans le cœur, du fond de ce tombeau,
Quelque chose de grand, de sublime et de beau !
Oh ! par tous ses côtés fais-moi voir toute chose !
Montre-moi que le monde est petit, car je n’ose
Y toucher. Apprends-moi ton secret de régner,
Et dis-moi qu’il vaut mieux punir que pardonner !
— N’est-ce pas ? — Ombre auguste, empereur d’Allemagne !
Oh ! dis-moi ce qu’on peut faire après Charlemagne !
Parle ! dût en parlant ton souffle souverain
Me briser sur le front cette porte d’airain !
Ou, si tu ne dis rien, laisse en ta paix profonds
Carlos étudier ta tête comme un monde ;
Laisse qu’il te mesure à loisir, ô géant !
Car rien n’est ici-bas si grand que ton néant !
Que la cendre à défaut de l’ombre me conseille !

Il approche la clef de la serrure.