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Page:Hugo Rhin Hetzel tome 2.djvu/133

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luxe de draperies et cette indigence de rideaux qui caractérisent les hôtelleries allemandes.

Quelque jour Mayence fera de la maison de Bona Monte et de la maison Zum Jungen ce que Paris a fait du vénérable logis du pilier des Halles. On détruira, pour le remplacer par quelque méchante façade ornée d’un méchant buste, le toit natal de ce Jean Gensfleisch, gentilhomme de la chambre de l’électeur Adolphe de Nassau, que la postérité connaît sous le nom de Gutemberg, comme elle connaît sous le nom de Molière Jean-Baptiste Poquelin, valet de chambre du roi Louis XIV.

Cependant les vieilles églises défendent encore ce qui les entoure ; et c’est autour de sa cathédrale qu’il faut chercher Mayence, comme c’est autour de sa collégiale qu’il faut chercher Francfort.

Cologne est une cité gothique encore attardée dans l’époque romane ; Francfort et Mayence sont deux cités gothiques déjà plongées dans la renaissance, et même, par beaucoup de côtés, dans le style rocaille et chinois. De là, pour Mayence et Francfort, je ne sais quel air de villes flamandes qui les distingue et les isole presque parmi les villes du Rhin.

On sent à Cologne que les austères constructeurs du dôme, maître Gérard, maître Arnold et maître Jean, ont long-temps empli toute la ville dé leur souffle. Il semble que ces trois grandes ombres aient veillé pendant quatre siècles sur Cologne, protégeant l’église de Plectrude, l’église d’Annon, le tombeau de Théophanie et la chambre d’or des onze mille vierges, barrant la route au faux goût, tolérant à peine les imaginations presque classiques de la renaissance, gardant la pureté des ogives et des archivoltes, sarclant les chicorées de Louis XV partout où elles se hasardaient, maintenant dans toute la vivacité de leurs profils et de leurs arêtes les pignons taillés et les sévères hôtels du quatorzième siècle ; et qu’elles ne se soient retirées, comme le lion devant l’âne, qu’en présence de l’art bête et abominable des architectes parisiens de l’empire et de la restauration. À Mayence et à Francfort, l’architecture-Rubens, la ligne gonflée et puissante, le riche caprice flamand, l’épaisse et inextricable végétation des grillages de fer chargés de