Page:Hugo Rhin Hetzel tome 2.djvu/188

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décrire le gîte. — La chambre à coucher. — Le tableau du chevet du lit. — Deux amants s’enfuyant à travers une épouvantable orthographe. — L’auteur se promène dans Worms. — Allocution aux parisiens. — L’agonie d’une ville. — Ce que Perse et Horace ont dit de la Petite-Provence qui est aux Tuileries. — Conseils indiscrets aux jeunes niais qui gâtent le costume des hommes en France à l’heure qu’il est. — La cathédrale de Worms. — Le dehors. — L’intérieur. — Le temple luthérien. — Mannheim. — L’unique mérite de Mannheim. — Par quelles gens Mannheim serait admiré. — Encore la figure de rhétorique que le bon Dieu prodigue. — Intéressante inscription recueillie à Mannheim.


Bords du Neckar, octobre.

La nuit tombait. Ce je ne sais quel ennui qui saisit l’âme à la disparition du jour se répandait sur tout l’horizon autour de nous. Qui est triste à ces heures-là ? Est-ce la nature ? Est-ce nous-mêmes ? Un crêpe blanc montait des profondeurs de cette immense vallée des Vosges, les roseaux du fleuve bruissaient lugubrement, le dampfschiff battait l’eau comme un gros chien fatigué ; tous les voyageurs, appesantis ou assoupis, étaient descendus dans la cabine, encombrée de paquets, de sacs de nuit, de tables en désordre et de gens endormis ; le pont était désert ; trois étudiants allemands y étaient seuls restés, immobiles, silencieux, fumant, sans faire un geste et sans dire un mot, leurs pipes de faïence peinte ; trois statues ; je faisais la quatrième, et je regardais vaguement dans l’étendue. Je me disais : je n’aperçois rien à l’horizon. Nous ne serons pas à Worms avant la nuit noire. C’est étrange. Je ne croyais pas que Worms fût si loin de Mayence. ― Tout à coup le dampfschiff s’arrêta. ― Bon, me dis-je, l’eau est très basse dans cette plaine, le lit du Rhin est obstrué de bancs de sable ; nous voilà engravés.

Le patron du bateau sortait de sa cellule. ― Eh bien, capitaine, lui dis-je, ― car vous savez qu’aujourd’hui on met sur toute chose un mot sonore : tout comédien s’appelle artiste, tout chanteur virtuose ; un patron s’appelle capitaine ; ― eh bien, capitaine, voilà un petit contre-temps. Du coup, nous n’arriverons pas avant minuit. —