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filles, père infâme ! « Heureusement, dis-je en sortant, qu’il y a le ciel après cette vie. » Je me retins pour ne pas ajouter : et qu’il y a un enfer !

J’avais des malades à visiter dans deux autres maisons. Je m’y rendis.

Dans l’une de ces familles, une enfant — la malade que je venais voir — était morte. La phtisie l’avait tuée. Et d’une. La mère était absente, je sus ensuite pourquoi ; ce fut le frère qui me reçut. Le jeune homme est infirme : enfant, il a eu les fièvres ; resté perclus d’une jambe, il ne marche qu’avec des béquilles. Et de deux. La grande sœur a été mise à la porte par sa mère pour une chose très grave, résultat de son inconduite. Et de trois. Le frère aîné est ivrogne. Et de quatre. La malédiction pèse sur cette famille : le père est ivrogne…

« Ça boit de père en fils », me dit le pauvre infirme, qui est, lui, un brave enfant. Le grand père, qui demeure au Lac Saint Jean, est venu aux fêtes passer un mois avec nous. Tous les soirs il s’est saoulé. La grand mère — que Dieu ait pitié de son âme — buvait également. Rien d’étonnant que le père boive ! »

Et le fils ivrogne donc, comment ne le serait-il pas ? Il se sent poussé à boire, et il gémit de cette inclination perverse. Un jour,