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— Peut-être 7 ou 8 verres de gin.

— Y a-t-il bien longtemps que vous buvez ?

— J’ai commencé lorsque j’ai pris le commerce des boissons, il y a 6 ou 7 ans.

— Je prenais d’abord quelques verres de bière, puis je passai au gin… Ah ! je regrette bien d’avoir tenu ce commerce. Mais ce n’est pas la boisson qui me fait mourir, vous le voyez, mon père. »

Je voyais tout le contraire. Du reste, le verdict du médecin était formel : le malheureux se mourait d’avoir bu. Mais comme il n’importait guère de l’en persuader, je changeai de sujet, et lui parlai des affaires de son âme, qui pressaient beaucoup plus.

Il mourut au cours de la mission, qui était une mission de tempérance. J’admirai comme Dieu se sert parfois de certains ivrognes pour prêcher les autres.

Je n’assistai pas aux derniers moments du moribond. Un témoin me rapporta que son dernier hoquet puait le gin, ajoutant cette réflexion que l’âme du défunt avait paru devant Dieu enveloppée « dans un nuage d’alcool ».