Page:Hugolin - Au fond du verre, histoires d'ivrognes, 1908.djvu/35

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C’est Henri qui parle de la sorte, en tendant la croix qu’il apporte.

Le père baissa la tête sans dire mot. La croix fut accrochée au mur…

Le père Boisdur n’avait rien répondu aux nobles paroles de son fils, mais il était resté rêveur…

On le vit beaucoup moins souvent à l’auberge. Il ne s’enivra plus jusqu’aux fêtes qui approchaient. Comment allait-il passer les fêtes ? Grave question pour la famille.

Le matin du jour de l’an, la famille reçut la bénédiction paternelle, puis l’aîné prit de nouveau la parole :

« Père, la croix est dans la maison. Je l’ai prise, moi l’aîné, au nom de la famille. Je désire donc qu’aujourd’hui il n’entre pas une seule goutte de boisson chez nous. »

Ce fut tout. Mais ce fut assez. Il n’entra pas une seule goutte de boisson ce jour-là chez le père Boisdur. Mais celui-ci ?…

Eh ! il pleura comme un enfant, n’accepta nulle part le verre du jour de l’an, revint chez lui parfaitement sobre, s’agenouilla avec sa famille au pied de la croix, à laquelle il jura d’être toujours fidèle, et reprit le sceptre qu’il avait laissé porter par l’aîné.

Bravo le fils ! Bravo le père !