Aller au contenu

Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 1, 1788.djvu/308

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
32
Essais.

opinions anciennement reçues. En lisant l’histoire de l’origine des nations, on croit être transporté dans un nouvel univers : toute la machine du monde y paroît détraquée : les élémens n’y font plus, les fonctions que nous leur voyons faire aujourd’hui : ce ne sont jamais les causes naturelles, que l’expérience nous découvre, qui produisent les batailles, les révolutions, les pestes, les famines, & les mortalités ; les prodiges, les augures, les oracles, les jugemens divins, couvrent de leur ombre obscure le peu d’événemens naturels qui y sont encore mêlés. Or, si nous observons que les miracles deviennent plus rares à chaque page à mesure que nous approchons des âges éclairés du flambeau de la science, nous n’y trouverons plus rien de mystérieux ni de surnaturel, nous verrons, qu’ils ne procedent que de l’inclination des hommes pour le merveilleux & l’extraordinaire : inclination à laquelle le bons sens & le savoir peuvent mettre, de tems en tems, des barrières, mais qui est trop profondément enracinée dans la nature humaine, pour pouvoir en être entièrement extirpée.