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de Morale.

Plus nous couverions avec les hommes & plus nous nous livrons à la société, plus nous nous familiarisons avec ces sortes de préférences & de distinctions générales sans la considération desquelles nos discours seroient à peine intelligibles. Chaque homme a des intérêts qui lui sont personnels, & l’on ne peut supposer que les desirs & les aversions qu’ils lui inspirent soient portés dans les autres au même degré. Ainsi le langage destiné à un usage général doit se fixer d’après des vues plus étendues : il doit attacher les épithetes d’éloge ou de blâme conformément aux sentimens que font naître les intérêts généraux de la société. Si dans la plupart des hommes ces sentimens ne sont point aussi forts que ceux qui regardent leur bien-être particulier, cela n’empêche pas que les personnes les plus dépravées & les plus dominées par l’amour-propre ne fassent quelque distinction & n’at-

    morale ne nous dit-on pas qu’il faut juger de l’arbre par ses fruits ? Et dans l’un & l’autre cas ne nous est-il point aisé de distinguer entre ce qui est naturel & ce qui est accidentel ?