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Essais

mais souvent ils raisonnent sûr la justice ou l’injustice de leurs actions. Dans la discussion d’une affaire criminelle, le premier objet de l’accusé, est de prouver qu’il n’est point coupable des faits dont on le charge & de nier les actions qu’on lui impute : le second est de prouver que ces faits, quand ils seroient vrais, peuvent être justifiés & regardés comme innocens & légitimes. Il est constant que le premier de ces points est soutenu par une suite de conséquences tirées de l’entendement : comment donc pouvons-nous supposer que c’est une faculté différente qui fixe l’autre point ?

D’un autre côté, ceux qui regardent le sentiment comme la source de la morale, s’efforcent de prouver qu’il est impossible à l’entendement de former des raisonnemens satisfaisans de cette espece : selon eux le propre de la vertu est d’être aimable, le propre du vice d’être odieux, cela est de leur essence & de leur nature ; mais la raison ou le raisonnement sont-ils en état d’appliquer ces différentes épithétes à une action, & de décider, avant que l’une de ces actions ait