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SUR L’ÉVOLUTION LITTÉRAIRE

celui pour qui le présent existe ; la psychologie, comme toute autre science, n’est que l’expression du successif. Je sais bien qu’il en faut, de la psychologie dans le roman. Mais qu’est-ce, au fond, le roman ? La pourriture de l’épopée. Mais l’épopée elle-même n’est que la littérature des peuples enfants.

La psychologie est un pont entre le symbolisme et le naturalisme, et on n’habite pas sur un pont, on y passe.

Le naturalisme n’a pas eu — n’a pu avoir de poètes. Par là même, condamné (car si quelqu’un vient nous dire que l’art des vers soit un jeu d’enfants, — ne vous le dira-t-on pas ? — souriez à cette vieille plaisanterie et consultez votre mémoire où vous trouverez en quelques beaux vers plus de splendeur de vérité qu’en tant et tant de volumes de prose).

Quant au symbole, c’est le mélange des objets qui ont éveillé nos sentiments et de notre âme, en une fiction. Le moyen, c’est la suggestion : il s’agit de donner aux gens le souvenir de quelque chose qu’ils n’ont jamais vu.

L’erreur du naturalisme, c’est, étant données les choses, d’en vouloir exprimer le sentiment adéquat par des mots. D’abord, c’est impossible, ensuite, ce serait un péché. Vouloir se substituer aux lois de la nature qui, elle, ne nous donne jamais de double ! Enfin, pourquoi faire ? Puisque la fleur existe, quelle utilité d’en créer une avec des mots, en admettant