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ENQUÊTE

lentement l’angora accroupi à côté de lui sur un canapé, et qui ronronnait les yeux mi-clos.

Brusquement il me dit :

— Voulez-vous sentir de la pâte à exorcisme ?

— Oui, dis-je, vous en avez ?

Il se leva, ouvrit une boîte et y prit un carré de pâte brunâtre ; puis il puisa un peu de cendre rouge dans la cheminée, sur une pelle, et y posa la pâte qui grésilla : un nuage épais s’éleva, et une odeur très forte envahit la pièce étroite, une odeur où se mêlait au parfum de l’encens la note acre et entêtante du camphre.

— C’est un mélange de myrrhe, d’encens, de camphre et de clou de girofle, la plante de saint Jean-Baptiste, me dit-il. De plus, c’est béni de toutes sortes de façons. Cela m’a été envoyé de Lyon : « Comme ce roman va susciter autour de vous une foule de mauvais esprits, je vous envoie ceci pour vous en débarrasser », m’a-t-on dit.

Un silence se fit. Je compris des Esseintes et Gilles de Retz, et, dans les rayons rouges du couchant qui venaient se briser sur les vitres illuminées, je cherchai vaguement la fuite de formes tordues et tourmentées par l’exorcisme…

Pour rompre le calme qui devenait pesant, je jetai :

— Que pensez-vous des psychologues ?

M. Huysmans jeta les cendres dans la cheminée et sourit :