Le petit cheval breton part d’un galop effréné. Il fait nuit presque noire. Cinq minutes passent.
— Nous n’arriverons pas, répète le groom. Voilà le train qui arrive !
Dans les ténèbres, au lointain, en effet, l’œil rouge d’une locomotive a paru, en même temps qu’un grondement sourd arrive à nos oreilles.
— Hue ! Coco !
Une réflexion rapide me traverse l’esprit :
— Vous ne m’avez pas dit quelle direction paraît prendre le roman ?
— Socialiste, il deviendra socialiste, évidemment ; l’évolution des idées le veut, c’est fatal, hue ! hue ! L’esprit de révolte fait des progrès, et je m’étonne, hue ! que les misérables ne brûlent pas plus souvent la cervelle aux millionnaires qu’ils rencontrent… hue ! Oui, tout changera en même temps, la littérature, l’art, l’éducation, tout, après le chambardement général… hue ! hue donc ! que j’attends cette année, l’année prochaine, dans cinq ans, mais qui viendra… hue ! hue ! j’en suis sûr !
Le cheval s’arrête, le train entre en gare. Je saute à terre, je serre fortement la main de mon hôte, la locomotive siffle et s’ébranle avant que j’aie eu le temps de me reconnaître. Par la portière, je crie : Adieu ! et une voix me répond :
— À cet été !