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ENQUÊTE

long ; et puis, il y avait la comparaison désastreuse des maîtres. Le lyrisme bamboulesque des symbolistes, qu’a répandu le reportage, ne présente, lui, aucun de ces inconvénients : d’où son rapide et légitime succès, qui grandira, espérons-le.

— … Comment !

— Mais oui ! Je veux dire que ce serait une belle aubaine si la décadence, par une sélection à rebours, débarrassait la gent artistique de la promiscuité des bouffons et des amateurs ! Et rien d’utopique à ce vœu : n’a-t-elle pas un public, bien digne de son fastueux crétinisme, dans les raffmés, ces cumulards de toutes les bêtises ?

Mon interlocuteur, le front plissé, le regard fixe, se promenait à travers la chambre, les mains dans les poches. Je m’oubliais à l’écouter et à le regarder, et cette éloquente indignation, que je sentais sincère, faisait taire toutes mes objections.

Je dis pourtant :

— Nierez-vous qu’une évolution artistique se prépare ?

— Je soutiens que cette évolution ne cesse jamais ! L’enquête que vous faites en ce moment eût été aussi opportune l’année passée, le serait non moins l’an prochain. La nature, pour enfanter des talents nouveaux, et la civilisation pour les mûrir, s’inquiètent peu qu’on les interviewe ! Tenez, ces proches temps, lorsque la critique — cette compréhensive, — et le