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les anthropoïdes et les hommes.

l’existence réelle de la série organique. Sans doute c’est là une condition indispensable du progrès, mais elle est loin d’être suffisante, et nous n’hésitons pas à dire que si nous n’avions qu’un chimpanzé à placer entre Michel-Ange et le premier des mammifères, il faudrait renoncer à toute généalogie naturelle de l’homme ; car, on ne conçoit pas en vertu de quelle secrète action, les anthropomorphes qui n’offrent aujourd’hui aucune tendance progressive auraient pu être poussés jadis vers le perfectionnement. La même remarque peut s’appliquer aux races humaines inférieures qui, loin de profiter de l’impulsion civilisatrice qui leur est donnée, s’éteignent et disparaissent chaque jour au contact des peuples européens. À ce point de vue, les singes anthropomorphes et les hommes de race inférieure me semblent représenter bien plutôt des formes incomplètes, impropres à toute évolution ultérieure, que des étapes de développement. Ce sont, si l’on veut, les branches collatérales et décidues d’un arbre dont le tronc vigoureux s’élance vers le ciel. Bien loin donc que les transformations organiques nous ramènent vers l’unité de type dans les différents ordres, il semble que le progrès consiste précisément dans l’extinction des êtres qui ne peuvent supporter les épreuves d’un degré de vitalité supérieur.

Ainsi l’homme a vraisemblablement pour progéniteurs, dans un passé dont la date est incalculable, des êtres à formes anthropoïdes, qui se rapprochaient de lui