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rapports anatomiques

convaincu que si cette théorie n’est pas exactement vraie, elle s’approche de la vérité pour le moins autant que l’hypothèse de Copernic par exemple, par rapport à la véritable doctrine des mouvements célestes.

Malgré toutes ces raisons, notre adhésion à l’hypothèse darwinienne restera provisoire aussi longtemps qu’un anneau manquera dans l’enchaînement des preuves, et cet anneau fera défaut aussi longtemps que les animaux et les plantes qui ont dans cette hypothèse une origine commune, ne pourront produire que des individus fertiles à postérité fertile. Car jusque-là on n’aura pas prouvé, en un mot, que le croisement par sélection naturelle ou artificielle est capable de réaliser les conditions nécessaires à la production des espèces naturelles, qui sont, pour la plupart, stériles entre elles.

J’ai exprimé cette conclusion aussi nettement que possible, parce que la dernière position dans laquelle je voudrais me trouver est celle d’avocat des théories de M. Darwin, ou d’ailleurs, de théories quelconques, si l’on entend par avocat un homme dont la tâche consiste à faire glisser l’esprit sur de réels obstacles, et de persuader là où il ne peut pas convaincre.

Pour être juste envers M. Darwin, il faut cependant reconnaître que les conditions de fertilité et de stérilité sont encore très-mal connues, et que chaque progrès dans la science nous conduit à regarder cette lacune particulière de sa théorie comme de moins en moins importante quand on la met en regard de la multitude des faits qui sont en harmonie avec elle ou qui en reçoivent une explication.

C’est pourquoi j’adopte la théorie de M. Darwin, sous la réserve que l’on fournira la preuve que des espèces physiologiques peuvent être produites par le croisement sélectif ;