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le quartier saint-séverin

répartit le ragoût de mouton, le lapin et le bœuf ; en fait de légumes, des haricots blancs ou rouges, de la purée de pois et des lentilles.

Ce menu est invariable et dans cet établissement le service n’existe pas. L’on doit done aller chercher, soi-même, son assiette, son couteau, son couvert d’étain et faire queue devant le cuisinier si l’on veut obtenir une portion.

Pèle-même, dans la salle enfumée par l’haleine des mets, des gens marchent avec précaution, tenant un bol à la main, puis s’attablent en silence, la casquette écrasée sur la nuque, et mangent, tandis que les camarades, qui ont déjà absorbé l’éponge enflée d’une robuste soupe, campent, d’un air faraud, leurs poings de chaque côté de l’assiette, les pointes de la fourchette et du couteau en l’air.

Dans cette salle où l’on est si serré les uns contre les autres que les tabourets sans dossiers se touchent, l’on ne boit généralement que de l’eau. De rares clients réclament cependant quelquefois un demi-setier, mais alors un garçon vient et, donnant donnant, il ne livre la topette que contre argent.

En somme, dans ce restaurant, la nourriture est simple, mais elle est résolument saine ; deux sous de bouillon, quatre sous de bœuf, les dix centimes de pain que l’on a apporté, pour quarante centimes, l’on