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Page:Huymans - La Bièvre, les Gobelins, Saint-Séverin, 1901.djvu/92

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le quartier saint-séverin

la « Maub », ainsi que l’appellent ses malandrins. Elle figure sur le plan gravé en 1552 par Olivier Truschet et Germain Hoyau, avec un petit pendu qui se balance au fil d’un joli gibet. Et le fait est que, pendant tout le Moyen Âge, on y roua, on y pendit, on y brûla les gens et que la besogne des tortionnaires ne chôma point. Au lieu de l’ancien pilori, se dresse maintenant la ridicule statue d’un glorieux bardache, le libraire philosophe Dolet. Il regarde par-dessus un bureau d’omnibus le marché sur l’emplacement duquel s’élevait autrefois le couvent des Carmes et il tourne le dos à une formidable boutique de marchand de vins, un comptoir immense, muni de cucurbites, de viscères de métal blanc, de muids, de monte-charges, de toute une série d’appareils qui font de ce magasin en rotonde une chambre de chauffe. De même que dans les autres assommoirs de la paroisse, les apéritifs et les cafés renforcés d’un petit verre valent quinze centimes, et cette usine à saouleries ne se vide pas. J’ai goûté à l’épouvantable barèges de ces absinthes et aux feux mal dorés de ces trois-six et, je l’assure, c’est étonnant.

Cet assommoir est situé à l’avant de ce colossal îlot de maisons qui tient un côté de la rue Lagrange et qui paraît n’être formé que par une seule et même bâtisse, et vraiment cet îlot de briques et de pierres est symbo-