Page:Huysmans - Croquis parisiens.djvu/150

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Laquedem est mon nom et j’ai dix-huit cents ans ; oui c’est moi, mes enfants, qui suis le Juif-Errant. » Puis il leur raconta ses longs voyages à travers le monde, ses courses incessantes, par monts et par vaux, par terre et par mer, et il s’écria quand il eut fini sa lamentable histoire : « Le temps me presse, adieu, messieurs, grâce à vos politesses, je vous en remercie. » Et il s’en fut appuyé sur sa longue canne, tandis qu’un petit ange, vêtu d’une robe rouge et d’ailes vertes, une épée dans une main, un rayon de gomme-gutte s’échappant de l’autre qu’il tenait ouverte, lui faisait signe de marcher, de toujours marcher !

Cet ange planait au-dessus d’une petite ville près de Bruxelles, en Brabant. Il planait au-dessus de maisons délimitées par un trait d’encre pâle et qui ne se détachaient que bien faiblement sur un ciel de papier gris.

Il planait au-dessus de pignons et d’une église surmontée d’une croix, au-dessus de toits en dents de scie, en poivrières, en cornets renversés, en éteignoirs, au-dessus d’un donjon percé de meurtrières.

(Imagerie d'Épinal. — Ch. Perrot, imp. lit.)