Page:Huysmans - Croquis parisiens.djvu/196

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l’arsenic, mais le Fowler lui éreinta l’estomac et ne le fortifia point ; enfin il usa, en dernier ressort, des quinquinas qui l’incendièrent ; puis il mêla le tout, associant ces substances les unes aux autres, ce fut peine perdue ; ses appointements s’y épuisaient ; c’étaient chez lui des masses de boîtes, de topettes, de fioles, une pharmacie en chambre, contenant tous les citrates, les phosphates, les proto-carbonates, les lactates, les sulfates de protoxyde, les iodures et les proto-iodures de fer, les liqueurs de Pearson, les solutions de Devergie, les granules de Dioscoride, les pilules d’arséniate de soude et d’arséniate d’or, les vins de gentiane et de quinium, de coca et de colombo !

Dire que tout cela c’est de la blague et que d’argent perdu ! soupirait M. Folantin, en regardant piteusement ces vains achats, et, bien qu’il n’eût pas voix au chapitre, le concierge était de cet avis ; seulement il époussetait la chambre, plus mal encore, sentant son mépris d’homme robuste s’accroître, pour ce locataire étique qui ne vivait plus qu’en avalant des drogues.

En attendant, l’existence de M. Folantin persistait à être monotone. Il n’avait pu se décider à rentrer dans son premier restaurant ; une fois il était allé jusqu’à la porte, mais, arrivé là, l’odeur des grillades et la vue d’une bassine de crème violette au chocolat, l’avaient fait fuir. Il alternait mar-