Page:Huysmans - Croquis parisiens.djvu/24

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comme un poisson qui roule et saute dans un épervier.

Des trépignements, des claquements de mains, des chocs de cannes contre le plancher, accompagnent, pendant leur descente, les acrobates. Une fois disparus entre des portants, des cris s’élèvent plus tumultueux, l’homme et la femme reviennent l’un, saluant très bas, l’autre, envoyant des baisers à pleines mains, puis, avec un petit saut d’enfants, ils se retirent de nouveau dans les coulisses.

Le filet qu’on ramène remplit encore la salle de ses bruits de lames qui déferlent.

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Et voilà que je songe à Anvers maintenant, au grand port où dans un roulement pareil s’entend le « all right » des marins anglais qui vont prendre le large. C’est ainsi pourtant que les lieux et les choses les plus disparates se rencontrent dans une analogie qui semble bizarre, au premier chef. On évoque dans l’endroit où l’on se trouve les plaisirs de celui où l’on ne se trouve pas. Ça fait tête-bêche, coup double. C’est la courte joie que le présent inspire, déviée à l’instant où elle lasserait et prendrait fin et renouvelée et prolongée en une autre qui, vue au travers du souvenir, devient tout à la fois plus réelle et plus douce.