Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/218

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— Tu t’es toujours bien portée ?

— Oui, merci et toi ?

— Oui, comme tu vois.

Il lui offrit son bras. – Où allons-nous, dit-il ?

— Nous allons dîner, ce ne sera pas bien loin ; c’est là, à côté.

Ils entrèrent, dans une rue latérale, à droite, et montèrent dans un restaurant installé à un premier étage.

La salle était déserte. André s’empressa de débarrasser les femmes de leurs manteaux et il s’assit en face d’elles.

— Tout le monde a fini de manger, dit Jeanne, en souriant ; et elle raconta qu’elle venait tous les jours avec la veuve Laveau, ici présente, dîner dans cette salle.

Il l’examinait ; elle était la même qu’anciennement, plus fraîche, plus grasse même. C’était toujours ce bout de nez riant sous des chipettes de cheveux pâles, dans un teint blanc, c’étaient toujours ces yeux actifs, pétillant au moindre mot, cette jolie tournure, ces fines mains, cette allure pimentée d’une Parisienne, ce petit air « tam-tam » , comme elle disait jadis, en parlant d’elle.

Elle était mieux mise qu’autrefois pourtant, vêtue tout de noir, avec un médaillon à camée qu’il lui avait toujours connu, des bagues à turquoises et à perles dont il se souvenait, et des boucles d’oreilles et des porte-bonheur qu’il ne se rappelait pas lui avoir jamais vu porter, de son temps.